Que se cache-t-il derrière une tablette de chocolat bio et équitable  ? L’exemple au Togo

L’arrivée sur le marché français de cette tablette de chocolat noir grand cru est une véritable victoire : certifiée biologique et vendue via le commerce équitable par la coopérative française Ethiquable, elle est un levier de lutte contre la pauvreté. En effet, les producteurs de cacao vivent en pays d’Akebou, une région où 78% de la population vit sous le seuil de pauvreté… Pourtant, ce succès n’était pas joué d’avance.

Le pari du Togo 

En matière de production, le Togo apparaît bien minuscule à côté de ses voisins, le Ghana et la Côte d’Ivoire, qui produisent respectivement 1 M et 2 M de tonne de cacao par an. Le Golfe de Guinée représente d’ailleurs 60% de la production mondiale et le cacao y est la principale culture de rente, dont les filières sont aux mains des multinationales, un monopole qui défavorisent les producteurs. Dans ce contexte, c’est aussi la production industrielle de cacao qui est privilégiée, à grand renfort d’intrants chimiques et de déforestation, avec des variétés hybrides de cacao de qualité moyenne.  

À l’inverse, le Togo rassemblait des conditions favorables pour développer une production durable de cacao biologique en agroforesterie, un modèle défendu par AVSF. Le pays détient également la variété ancienne amélonado, un cacao fin intéressant pour les chocolatiers. Il s’agissait donc de positionner cette production sur un marché de niche de haute qualité. Pour mettre en place ce projet, AVSF a identifié la coopérative de producteurs Atsémawoe, qui rassemblait les meilleures potentialités et des expériences en agriculture biologique. 

Un accompagnement au long court 

C’est en 2010 que débute la coopération entre AVSF et la coopérative Atsémawoe. Celle-ci est composée de paysans et paysannes qui cultivent de petites parcelles en montagne avec une production très diversifiée : manioc, maïs, riz, poivre, gingembre, igname, etc. 

C’est surtout dans la culture du cacao qu’AVSF est intervenue  : il s’agissait de former les producteurs aux bonnes pratiques agricoles pour augmenter les rendements et la qualité du cacao. Les producteurs ont appris à mettre en place les grands principes de l’agroforesterie, avec les associations de culture, en replantant dans les parcelles des arbres fruitiers ou des grands arbres forestiers procurant de l’ombre dont sont friands les cacaoyers. D’autres pratiques ont été mises en œuvre comme l’entretien, la tailles des cacaoyers et les renouvellements des plants avec la création de pépinières, l’utilisation d’alternatives aux intrants chimiques.  

L’étape la plus longue a été l’obtention des certifications bio et équitable. AVSF a formé les producteurs, pour qu’ils suivent rigoureusement les exigences des cahiers des charges et qu’ils obtiennent par eux-mêmes ces labels, afin de se positionner sur ces marchés plus rémunérateurs.  

L’étape de la post-récolte était tout aussi cruciale, AVSF et les producteurs ont créé un dispositif inédit au Togo : centraliser les fèves pour la fermentation et le séchage, afin d’homogénéiser la qualité. Une nouveauté qui allait à l’encontre des pratiques individuelles.  

Dernière étape  : favoriser la vente du cacao, en renforçant les compétences commerciales de la coopérative. Formation à la gestion comptable, conception d’un modèle économique, mise en relation avec de potentiels acheteurs (visites terrain ou participation à des foires) étaient au programme. C’est ainsi qu’a eu lieu la rencontre avec Ethiquable. 

Naissance d’un tablette bio et équitable 

La scop Ethiquable partage avec AVSF la volonté de rendre aux paysans leur autonomie et pouvoir d’agir. Le premier achat de cacao a lieu en 2018 pour produire de la poudre de chocolat. Puis, la qualité de la matière première, l’augmentation des volumes récoltés et la solidité de l’organisation s’améliorant, Ethiquable a pu lancer une tablette de chocolat en 2021, avec l’achat de 30 tonnes de cacao. Le cacao est acheté à un prix bien au-dessus du marché : 3,30€ le kg contre 2,40€ pour le cacao conventionnel. Ce différentiel permet à la coopérative de rentrer dans ses frais et de mieux rémunérer ses membres.  

L’engagement n’est pas seulement commercial, puisqu’Ethiquable investit dans la coopérative afin de maintenir du personnel technique, renforcer le contrôle interne et la gouvernance. Elle leur offre aussi des formations  en matière de contrôle qualité ou un voyage en Côte d’Ivoire afin qu’ils acquièrent des compétences auprès d’autres coopératives dans la production d’intrants bio, des alternatives incontournables aux intrants chimiques couteux et dangereux.  

Cette tablette est l’illustration de la complémentarité des actions d’AVSF et d’Ethiquable. Elle constitue un véritable trophée  : elle offre une meilleure rémunération aux producteurs, participe au développement des transitions agroécologiques et démontre que les organisations paysannes peuvent être actrices de leur destin. 

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