Pratique ancestrale fondée sur un équilibre fin entre éleveurs, animaux et écosystèmes, le pastoralisme est malheureusement souvent pointé du doigt pour son impact sur le changement climatique et la désertification. Qu’en est-il réellement ?
Le pastoralisme est une forme d’élevage qui consiste à se déplacer avec son troupeau au gré des saisons, en fonction de la disponibilité des ressources naturelles, pâturages et points d’eau. En Afrique de l’Ouest, le pastoralisme nomade est l’une des activités économiques principales et présente l’avantage de valoriser de manière durable des espaces non-cultivables, façonnant ainsi les paysages depuis des milliers d’années.
À rebours de certaines idées, le pastoralisme peut également avoir un impact positif sur l’environnement. Il permet en effet de fertiliser naturellement les sols grâce aux déjections animales, et requiert moins d’eau et d’intrants que l’élevage sédentaire. Autre intérêt de taille, il constitue par essence une solution efficace d’adaptation au changement climatique du fait de la mobilité des troupeaux.
Comment le changement climatique impacte le pastoralisme ?
Comme l’explique Manon Lelarge, coordinatrice d’AVSF en Mongolie, « avec le pastoralisme, les éleveurs suivent les besoins de leurs troupeaux et s’adaptent à leurs écosystèmes. » L’élevage itinérant repose sur les savoir-faire ancestraux des pasteurs et leurs connaissances fines des écosystèmes. Avec le dérèglement climatique, les saisons se trouvent bouleversées, et les parcours des éleveurs-euses aussi.
En Afrique de l’Ouest, on constate parfois un retard du début de la saison des pluies et une forte variabilité de leur intensité et de leur fréquence, avec un risque croissant d’inondations ou de sécheresses. En Mongolie, les changements climatiques accentuent le phénomène de dégradation des ressources naturelles causé par le surpâturage. Entre imprévisibilité de la météo et manque de ressources fourragères dû à la désertification, les éleveurs et éleveuses ouest africains comme mongols ont donc tendance à modifier leurs modes de vie, voire à se sédentariser.
Comment s’adapter à ces nouvelles conditions ?
En Mongolie, au Sénégal et au Mali, AVSF mène de nombreux projets pour permettre aux éleveurs et éleveuses de s’adapter à ces dérèglements. Un des premiers défis à relever est celui d’une gestion concertée et durable des pâturages. Que ce soit en raison d’un nombre trop important d’animaux par rapport aux capacités des pâturages en Mongolie, ou à cause des conflits entre agriculteurs et éleveurs en Afrique de l’Ouest, le partage des ressources naturelles peut être source de tension et de dégradation des écosystèmes. En Mongolie, nous soutenons 30 organisations d’éleveurs, qui regroupent 6 255 familles, dans la gestion responsable des pâturages à travers une certification portant sur la durabilité de la filière cachemire. Les organisations sont ainsi appuyées dans la création de « groupements d’usagers des pâturages » qui permettent d’rorganiser collectivement la répartition des espaces et ressources.
Allier savoirs ancestraux et nouvelles technologies peut également s’avérer utile pour faciliter le travail des éleveurs. Des images satellites servent par exemple à informer les éleveurs sur la biomasse et la quantité de pâturages disponibles, et l’utilisation de la radio et des téléphones portables permet de les avertir en temps réel sur l’état des points d’eau et des pâturages, l’existence de feux de brousse, ou encore la présence d’épidémies.
À travers le monde, l’élevage pastoral fait vivre plus de 100 millions de personnes. À travers nos projets, nous accompagnons la mise en place de pratiques plus durables et défendons ce modèle d’élevage face à des politiques publiques souvent plus favorables à la sédentarisation ou aux stratégies d’économie d’échelle des acteurs commerciaux.